Une matinée à Santiago

10 septembre 2019

1, 2, 3 semaines! Le temps file sans se retourner pour figer de son regard la ribambelle de moments colorés qui constituent ma vie à l’autre bout du monde. Coup de vent sur le calendrier, les pages s'envolent, couvertes d'histoires. Et c'est une ville chargée d'Histoire qui fera l'objet de l'article d'aujourd'hui. 

Il y a trois semaines, c'est au petit matin que nous avions atterri à Santiago avec les autres étudiants d'échange. Cette fois ci, c'est sous les étoiles (ou plutôt sous les nuages car on ne distingue pas vraiment les montagnes qui sont généralement visibles comme le nez au milieu de la figure) que nous nous approchons de la ville en suivant la Panamericana Sur. L'autoroute sursaute sur une colline et soudain la capitale illuminée apparaît. Les milliers d'yeux jaunes de haut en bas des buildings jamais tout à fait endormis saluent chaque nouvel arrivant d’un regard souriant. Cette vision privilégiée au dessus de la ville ne dure qu’un instant, je n’ai pas le temps de dégainer mon portable pour la capturer en photo. “Se nos pasó el cuarto de hora”* commente mon père d’accueil sur ma tentative photographique pas assez vive. Pas grave, la beauté du moment résidait aussi dans sa fugacité, autant la laisser parcourir librement ma mémoire plutôt que de l’encadrer dans une photo. 

Nous arrivons dans l’appartement à quelques blocs de la place de la Moneda après avoir dîné sur la route de completos. Les completos, c’est une des spécialités dont la plupart des Chiliens sont locos. Il s’agit d’un hot dog augmenté avec un arc en ciel de sauces: ketchup, mayonnaise, mais surtout palta (avocat). Mon premier completo chilien:


Le lendemain matin, place au tourisme. Nous n’avons pas beaucoup de temps car nous devons accompagner ma mère d’accueil à l’aéroport vers midi, ainsi nous sortons vite de l’appartement, direction la place de la Moneda en empruntant le paseo Huerfanos. Les rues sont animées et bordées de petits kiosques aux couleurs chatoyantes et de vendeurs ambulants de divers encas aux odeurs attrayantes. Voici une petite compilation de photos prises  tout au long de la matinée:


Pause cigarette entre Grazia et grignotages


Stand de Mote, boisson typique chilienne qui m’évoque une boule à neige où les flocons seraient remplacés par des grains de blé mouvant dans une sorte de jus de pêche. Tout simplement exquis.


Snack kingdom...

En arrivant sur la place, nous nous approchons d’un attroupement devant le palais, un peu intrigués. Le mois de septembre a commencé, donc la commémoration de l’indépendance chilienne aussi. Cela veut dire cueca (danse traditionnelle), asados (barbecue), et célébrations de la chilenidad pendant un mois: le bon moment pour faire un défilé des carabineros (police) devant le siège de la présidence, pour un public à majorité touristes brésiliens (et nous ;).





Nous poursuivons notre chemin vers la Plaza de Armas, qui est le noyau de chaque ville chilienne où se trouve la cathédrale, la poste, ainsi que le musée historique.



La cathédrale de style néoclassique se reflète sur les vitres du Mall Puente. Cela illustre bien l’aspect protéiforme de la capitale enlacée par la Cordillère des Andes. Le passé fait une accolade à la modernité, richesse et pauvreté ont la garde alternée des blocs du centre ville, les accents roulent et se mélangent en tissant un grand patchwork qui surprend à chaque coin de rue. 



Le museo de Santiago, aussi appelé Casa Colorida pour sa couleur rouge vive, se trouve à deux pas de la Plaza de Armas. Cette bâtisse antigua se métamorphose au fil des ans. Initialement construite comme la demeure d’un grand nom au XVIIIe siècle, elle se transforme en galerie commercial, restaurant et bar jusqu’en 1970, date à laquelle elle devient et reste musée (du moins pour l’instant).


Drapeaux et confettis pour célébrer les fêtes nationales comme il se doit.



Et enfin le Mercado Central, l’étape finale de notre découverte. Le fer forgé grimpe comme du lierre jusqu’au plafond. Au centre rivalisent une dizaine de restaurants de poisson dans une semi obscurité confortable. L’enseigne Donde Augusto semble cependant régner sur la concurrence de caldillos de congrio façon Pablo Neruda. En effet, le poète raffolait de ce plat de poisson dans du “jus d’océan”, qui lui a même inspiré une ode décrivant amoureusement la préparation “hasta que en el caldillo /se calienten /las esencias de Chile, / y a la mesa /lleguen recién casados / los sabores / del mar y de la tierra/ para que en ese plato / tú conozcas el cielo.

(Oda al Caldillo de Congrio: “jusqu’à ce que dans le ragoût se réchauffent les essences du Chili et qu’à la table parviennent les saveurs de la mer et de la terre récemment unies, pour que grâce à ce plat tu connaisses le ciel.”)


Il est presque 11h et les tables sortent de leur sommeil et se font belles pour leur rendez vous quotidien avec le gourmet qui fait ressusciter chaque fois la chanson du poète satisfait. Malgré les nombreuses invitations à nous attabler, nous nous en allons vers l’aéroport: c’est la fin de cette première matinée à Santiago.

    Dans la voiture, la radio entonne une autre mélodie digne de la sélection de Nostalgie en France. Mais ce jour là la voix inattendue de France Gall réchauffe mon coeur. “Ella elle l’a”, elle là, est là: au bon endroit.

Commentaires

  1. Quelle belle émotion de se sentir vivante au bon endroit au bon moment !

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